Parlons Sciences #4

#4 Le métier de médiateur·trice scientifique

Bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast Parlons science, le podcast de la médiation scientifique. Je suis Blandine Déjean, directrice de l’association EbulliScience. Notre métier, notre objectif, c’est de faire découvrir et aimer les sciences auprès de tous les publics. Aujourd’hui, nous recevons Noémie et Corentin avec qui nous allons parler de leur métier, médiateur et médiatrice scientifique.

Blandine Déjean : Bonjour Noémie Faisnel et Corentin Mammi, bienvenue dans ce podcast EbulliScience. On va commencer par la question que nous posons à tous nos invités : quel était votre rapport aux sciences quand vous étiez enfant ?

Corentin Mammi : J’ai toujours aimé les sciences. À l’école, j’avais de bonnes notes en maths, ça me plaisait bien. J’aimais aussi beaucoup les jeux de construction, comme les Kapla. Quand j’étais tout petit, je voulais être architecte, ça m’attirait vraiment. Puis même, tout ce qui touche à la science dans les livres, les dessins animés, la science-fiction, c’est un univers qui me fascinait. J’étais fan de dessins animés de science-fiction, de super-héros futuristes… Je rêvais d’inventer la téléportation, comme beaucoup d’enfants, je crois !

Blandine : Et tu me disais tout à l’heure qu’il n’y avait pas de scientifique dans ta famille, personne qui avait fait des sciences ?

Corentin : Non, pas vraiment. Mes parents n’aimaient pas trop ça, et ils n’avaient jamais eu de très bonnes notes à l’école. Ils étaient toujours un peu surpris de voir ma sœur et moi nous épanouir dans ce domaine. Ils nous disaient souvent : « Mais comment vous avez fait ? Ce n’est pas possible ! »

Blandine : Et toi, Noémie ? Quel était ton rapport aux sciences ?

Noémie Faisnel : Moi, ça passait surtout par la télévision, notamment avec C’est pas sorcier. Jamy, le fameux Jamy ! J’étais fascinée par tout ce qu’on peut découvrir autour de nous, et surtout par ce qui touche un peu à la médecine. Toi, tu voulais être architecte ; moi, je voulais être médecin… Bon, voilà, je ne le suis pas devenue ! Mais j’aimais aussi beaucoup les jeux de société basés sur la science. Parfois, c’était des jeux sur les espions ou la police scientifique. Il y avait plein de petites expériences que je pouvais faire quand j’étais plus jeune.

Blandine : Ce qu’on entend chez vous deux, c’est le rapport au plaisir : la science-fiction, les jeux, tout ce qui fait rêver. Et vous avez un souvenir d’enseignant ou d’enseignante qui vous a particulièrement marqué·e ?

Corentin : Oui, tout à fait ! Pour moi, c’était Madame Cordier, mon enseignante de latin et grec au lycée. Ces matières n’ont pas une image très valorisée, on voit ça comme des langues mortes, inutiles, presque juste des points bonus pour le bac. Mais elle a complètement changé cette vision pour moi. Elle voyait les langues anciennes comme la base de nos langues actuelles. Avec elle, c’était presque comme des jeux de construction. On reconstruisait les mots, c’était passionnant ! Cette approche a vraiment éveillé ma curiosité sur plein de domaines différents, y compris en sciences, parce que toute cette mécanique de réflexion en latin et grec, elle sert partout ailleurs, y compris dans les sciences.

Blandine : Oui, elle t’a vraiment fait comprendre l’intérêt du latin, en fait. Et toi, Noémie ?

Noémie : Pour moi, c’était au collège. J’avais une professeure de français qui aimait rendre l’orthographe plus amusante. Parce qu’au collège, c’est un peu les derniers moments où on a des cours de français, orthographe, grammaire, dictée…  et ça peut être assez barbant. Mais elle ajoutait toujours une touche ludique, ce qui rendait l’apprentissage du français bien plus agréable. Ça nous donnait vraiment envie d’apprendre.

Blandine : Oui, donc toujours cette idée de plaisir et de faire les choses différemment. Vous nous expliquerez tout à l’heure comment vous abordez vos séances, peut-être de façon un peu inhabituelle. Mais pouvez-vous d’abord revenir sur votre parcours d’études ? Et nous glisserons doucement vers ce qui vous a amené à travailler chez EbulliScience.

Corentin : Alors moi, j’ai fait une école d’ingénieurs, l’Institut National des Sciences Appliquées, l’INSA de Lyon, où je me suis spécialisé en matériaux. C’est une spécialisation assez vaste, car les matériaux, c’est littéralement tout ce qui nous entoure. On est assis sur des matériaux, on parle à travers des matériaux… J’ai choisi cette spécialité parce qu’elle permettait d’aller au niveau fondamental de la matière, d’explorer ce qui se passe à l’échelle des atomes. Et en même temps, c’était une spécialisation assez large, avec des débouchés variés. Je ne savais pas encore ce que je voulais faire, et je n’étais pas totalement certain de l’ingénierie.

À la base, je voulais être graphiste au collège et au lycée, mais on m’a dit que, vu mes notes en sciences, ce serait dommage de ne pas en faire quelque chose. Alors, je me suis convaincu de faire ingénieur. Je me disais : « Ce sera peut-être un métier plus utile pour la société, même si je suis sûr que le métier de graphiste est très utile aussi. » Je pensais qu’avec les sciences, on pouvait apporter des avancées concrètes, avec des inventions, du progrès…

L’école d’ingénieurs a été une expérience formidable, j’y ai énormément appris et je me suis épanoui, notamment dans la vie associative de l’INSA, qui est très riche. Mais j’ai aussi réalisé que l’ingénierie et les sciences ne sont pas aussi idéales ni aussi utopiques que dans la science-fiction ou les dessins animés. Cette image que j’avais s’est un peu effritée.

À la fin de mes études, je me suis retrouvé en me demander : « Et maintenant, qu’est-ce que je fais ? » Je ne me retrouvais pas vraiment dans l’ingénierie, mais je voulais tout de même utiliser ce bagage scientifique que j’avais acquis, tout en gardant cette idée d’utilité sociale qui m’avait toujours motivé. Et c’est ce qui m’a orienté vers la médiation scientifique.

Blandine : Et toi, Noémie, qu’est-ce que tu fais actuellement en termes d’études ? Et comment t’es-tu retrouvée chez EbulliScience ?

Noémie : Alors, pour moi, comme on en parlait tout à l’heure, les sciences étaient vraiment un domaine que je voulais explorer dès le départ. C’est pour ça que j’ai fait des études en sciences, et après une licence en biologie, je me suis posé la question de la suite. Il faut dire que le premier confinement en 2020 a pas mal chamboulé les choses. Ça a amené beaucoup d’interrogations sur ce que je voulais faire après, surtout dans un contexte où la transmission des savoirs scientifiques était parfois remise en question, notamment avec des figures comme Didier Raoult.

Durant ma licence, j’ai eu l’occasion de travailler sur un projet où je devais présenter un poster scientifique à des personnes qui ne connaissaient pas vraiment le sujet. J’ai vraiment apprécié l’expérience de transmettre des connaissances. J’avais aussi cette envie de partager la science avec mes proches, notamment mes parents qui n’ont pas fait d’études scientifiques. Mais parfois, je ne me sentais pas totalement légitime pour leur en parler.

Je me suis donc dit : pourquoi ne pas faire une formation ? Aujourd’hui, je suis dans un master Information et médiation scientifique et technique (IMST) à l’Université Lyon 1. J’ai commencé en septembre 2022, et c’est dans le cadre de cette formation que j’ai rejoint EbulliScience, en alternance.

Blandine : Et ça consiste en quoi exactement ? Tu as une semaine au sein de l’association et d’autres semaines dans ta structure d’enseignement, c’est bien ça ?

Noémie : Oui, c’est ça. Alors, je suis en deuxième année de master. La première année, c’était une alternance en rythme de semaine, c’est-à-dire une semaine de cours, puis une semaine en entreprise. Ensuite, à un certain moment de l’année, je suis passée à temps plein en entreprise. C’était vraiment intéressant, car je ne connaissais pas du tout la médiation avant. Avec EbulliScience, j’ai pu plonger dans le concret, ce qui m’a permis de lier l’aspect théorique de la formation avec la pratique de la médiation.

Blandine : Justement, si vous deviez décrire le métier de médiateur ou médiatrice scientifique à des gens qui ne connaissent pas du tout, comment vous l’expliqueriez ? Allez, on le fait, parce que je suis sûre qu’il y a plein de gens qui nous écoutent et qui ne connaissent pas.

Noémie : Ce n’est pas toujours évident, car quand on parle de médiation scientifique, les gens sont souvent un peu surpris. Beaucoup associent le terme « médiation » à la gestion de conflits ou à la médiation sociale. L’aspect « scientifique » intrigue encore plus. Du coup, pour expliquer, je dis souvent que c’est un peu comme C’est pas sorcier : transmettre la science de manière accessible. Ça peut aussi se rapprocher du rôle des médiateurs dans les musées, ceux qui accueillent et expliquent les expositions. L’échange est essentiel en médiation, il ne s’agit pas juste de donner des réponses toutes faites, mais d’ouvrir un dialogue, d’encourager les questions. C’est ce qui rend ce métier si particulier, surtout à EbulliScience, où l’on favorise la réflexion.

Corentin : Oui, c’est vrai ! Souvent, quand je dis « médiateur scientifique », on me demande de répéter le terme « médiateur », parce que ce n’est pas un mot très courant. Alors, pour simplifier, je dis parfois « animateur ». Ça aide à introduire l’idée de l’animation, mais avec une dimension scientifique : au lieu de faire des jeux comme le ballon prisonnier ou des coloriages, on propose de la chimie, de l’électricité… C’est une autre façon d’aborder la découverte, mais tout aussi ludique.

Blandine : Et comment ça se passe concrètement, plus particulièrement à EbulliScience, avec cette pédagogie active ? Si vous deviez décrire comment on applique ça dans les sciences, que diriez-vous ?

Corentin : Je dirais que l’essentiel, c’est de bien structurer l’animation pour mettre les enfants dans des situations où ils peuvent vraiment découvrir et expérimenter par eux-mêmes. On les encourage à toucher, manipuler, tester des choses. Une fois l’expérience lancée, on intervient le moins possible. Bien sûr, on est là pour poser des questions, et c’est même ça qui est le plus délicat : poser les bonnes questions, sans jamais donner les réponses. L’idée est de créer un cadre où ils peuvent explorer et comprendre le plus de choses possible, dans un environnement stimulant et sécurisé.

Blandine : C’est facile de maintenir cette posture d’accompagnement, d’être à côté, sans donner les réponses ?

Noémie : Non, c’est vrai que c’est parfois contre-intuitif. À l’école, on est habitué à apprendre en écoutant, en écrivant, sans poser trop de questions. À EbulliScience, c’est l’inverse : c’est à nous de poser plein de questions aux enfants, alors qu’eux ont l’habitude d’être ceux qui questionnent. C’est un peu paradoxal ! Et c’est vrai que ce n’est pas toujours simple, surtout quand ils sont curieux, qu’ils veulent des réponses immédiates. On doit résister à l’envie de leur donner les solutions, tout en les aidant à progresser. Mais au fil du temps, ça devient enrichissant, même plaisant.

Blandine : Ça devient peut-être plus facile avec le temps ?

Corentin : Ah oui, à force, c’est même reposant. On n’a plus besoin de connaître toutes les réponses ; on les laisse faire, et si on n’a pas les réponses, ce n’est pas grave.

Blandine : Et j’imagine qu’avec votre accompagnement, vous voyez souvent les enfants trouver les réponses par eux-mêmes.

Corentin : Exactement. Le but du cadre que nous mettons en place est de leur offrir un environnement favorable pour qu’ils découvrent plein de réponses par eux-mêmes. Parfois, cela mène même à des réponses qui nous surprennent totalement, auxquelles nous ne nous attendions pas !

Blandine : Justement, avant de partager quelques anecdotes surprenantes, j’aimerais savoir ce que vous pensez des problématiques potentielles de la pédagogie active. Quelles observations critiques pourriez-vous faire à ce sujet ?

Noémie : C’est vrai que parfois, les enfants s’accrochent à une idée et finissent par réaliser quelque chose, comme une construction, sans vraiment avoir un but précis à la fin. Cela peut montrer les limites de la pédagogie active, car l’idée est de leur permettre d’explorer ce qu’ils veulent, mais toujours dans un cadre bien défini. Cependant, l’aspect scientifique n’est pas toujours présent, surtout avec le jeune public, comme les 3-5 ans, qui ne sont pas toujours dans la réflexion. Ils ont tendance à se concentrer sur des activités comme le coloriage. C’est une limite à prendre en compte. Il y a aussi le risque que, parfois, nous nous reposions trop sur cette méthode, ce qui peut rendre notre médiation moins active.

Blandine : Vous avez mentionné que le public de 3-5 ans est celui avec lequel on peut se poser le plus de questions sur la pédagogie active. Pourriez-vous développer ?

Corentin : Tout à fait. Je pense qu’on ne peut pas appliquer la pédagogie active de manière pure dans tous les cas. Il y a certaines thématiques où ça fonctionne mieux que d’autres. Par exemple, lorsque beaucoup de motricité fine est requise, avec des petites manipulations qui demandent de l’agilité, les enfants ont davantage besoin d’être cadrés. Il est souvent nécessaire de leur montrer comment faire pour qu’ils puissent ensuite essayer de reproduire nos gestes. Cette approche peut sembler incompatible avec la pédagogie active, mais elle reste très enrichissante pour les sciences et bénéfique pour les enfants.

Blandine : Corentin, as-tu une anecdote marquante ou drôle à partager sur la médiation scientifique, peut-être une réflexion d’enfant ?

Corentin : Justement, en restant sur le thème de la motricité fine et des 3-5 ans, avec Noémie, nous avions animé une séance dans une MJC pour des maternelles. Nous avions choisi le thème de la chimie, où l’objectif était de manipuler des pipettes et des tubes à essai avec des liquides colorés à mélanger. Les enfants avaient tous leur petite pipette et leurs tubes, et ils prenaient le liquide dans des béchers pour le verser dans des tubes à essais pour observer le mélange des couleurs.

Il y avait un enfant qui avait parfaitement compris comment aspirer le liquide en appuyant sur la pipette. C’était déjà un bon point ! Mais il ne réalisait pas qu’une fois la pipette remplie, s’il la laissait au fond du tube à essai et relâchait la pipette sans la sortir, tout le liquide remontait directement dans celle-ci.
C’était assez comique : il vidait sa pipette dans son tube, puis la relâchait, et le liquide remontait dans la pipette. Ensuite, il retournait au bécher pour en reprendre, mais rien ne changeait, car son tube restait vide. Il a continué comme ça pendant quelques minutes. J’étais fasciné de le regarder faire avec obstination. Puis j’ai fini par l’interpeller. Finalement, il a aussi compris ce qui se passait.

Blandine : On est vraiment là sur l’observation du phénomène et sur la recherche de solutions à son problème. Noémie, as-tu une anecdote à partager ?

Noémie : Je n’ai pas vraiment une anecdote centrée sur un enfant, mais plutôt sur l’expérience avec les 3-5 ans, qui est un public assez drôle. Il y a toujours beaucoup de surprises avec eux. On peut prévoir un déroulé de séance, mais ils ont tendance à le détourner. Par exemple, lors d’expériences sur l’eau. On en a beaucoup à EbulliScience. Ça finit souvent par ressembler à une pataugeoire. Peu importe ce qu’on avait en tête, leur but, c’est de mettre de l’eau partout et de jouer plutôt que de se concentrer sur les sciences.

Blandine : C’est le côté ludique, n’est-ce pas ? Qu’en pensez-vous ?

Corentin : C’est ce qu’on évoquait plus tôt. S’adapter peut être un peu difficile, car on arrive avec une image des sciences très rigoureuse. Mais finalement, laisser la créativité des enfants s’exprimer a aussi ses avantages. Ça demande de prendre sur soi et de réussir à les accompagner sans que les choses ne débordent trop.

Blandine : Oui, cela nous aide à déconstruire notre rapport à l’enseignement et à la pédagogie. Est-ce que tu as une autre anecdote, Corentin ?

Corentin : J’en ai plein ! Récemment, dans notre Salle de Découverte Scientifique à Vaulx-en-Velin, c’est un peu comme le musée d’EbulliScience, mais ici, contrairement à d’autres musées, c’est interdit de ne pas toucher. Toutes les expériences présentées, tout le matériel, est accessible. C’est même écrit sur les murs : « Interdit de ne pas toucher ». Ce jour-là, nous avions une expérience avec un agitateur magnétique. Ce sont des petits aimants qui tournent au fond d’un bocal et si on le fait tourner assez vite, ça crée un tourbillon d’eau. Une petite fille a testé cette expérience et, lorsqu’elle a réussi à créer le tourbillon, elle s’est exclamée : « Waouh, mais alors c’est ça la science ? C’est trop bien ! Je pensais que ça allait être nul, mais en fait, c’est super intéressant ! »

Blandine : J’adore cette anecdote ! Qu’est-ce que vous apporte ce métier au quotidien ? Il y a des rires, des surprises… Mais qu’en est-il vraiment ? Corentin, tu es salarié de l’association, et Noémie, tu es en alternance, donc tu travailles régulièrement ici. Qu’est-ce que ce métier vous apporte ?

Corentin : Sur le plan personnel, cela m’a beaucoup apporté en confiance en moi, notamment pour la prise de parole en public. Au début, je n’étais pas très à l’aise, mais avec la pratique, je suis devenu beaucoup plus confiant. Découvrir cette pédagogie active et cette flexibilité d’esprit m’a également aidé dans ma vie quotidienne. Cela influence mes réflexions, même si je n’ai pas d’exemple concret à donner.

Blandine : Et toi, Noémie, qu’est-ce que ça t’apporte ?

Noémie : C’est un peu similaire. Même si nous ne transmettons pas toujours des informations de manière traditionnelle, nous sommes souvent devant un public, ce qui m’a permis de gagner en aisance à l’oral. À force de poser beaucoup de questions, je me rends compte que je pose maintenant trop de questions dans ma vie quotidienne, à tel point que certains me disent : « tu poses beaucoup trop de questions ». Cela m’a rendue encore plus curieuse qu’avant. Maintenant, je me pose beaucoup de questions, même des questions sur les questions elles-mêmes. Je réalise que la science n’est pas seulement de la rigueur ; elle implique aussi une remise en question, parfois même de manière philosophique.

Blandine : Avec le recul, Corentin, qui a fait des études d’ingénieur en sciences, comment perçois-tu la manière dont on pratique les sciences ici et la réflexion qui en découle ? Tu ne l’as pas évoqué tout à l’heure, mais je me souviens que tu m’avais dit, lors d’une discussion il y a quelques temps : « J’ai fait des stages, et en tant qu’ingénieur, je me suis rendu compte que ce n’est pas dans ce milieu que je veux évoluer. »

Corentin : C’est sûr qu’on s’amuse beaucoup plus chez ÉbulliScience qu’en TD de chimie en prépa, ça, c’est évident. J’avais déjà des doutes sur la voie que je suivais, surtout vers la fin de mes études, sans parler des stages. Je m’attendais à ce que ces stages me confirment ou non mes hésitations. Et en effet, aller en entreprise et travailler sur un projet scientifique à long terme, lié au monde de l’entreprise, m’a fait réaliser que tout était tourné vers le profit et ce qu’on pouvait en tirer. Ce n’était pas quelque chose qui m’intéressait vraiment. C’est pour cette raison que je me suis tourné vers la médiation.

Blandine : Qu’est-ce qui t’a marqué quand tu es arrivé chez ÉbulliScience ?

Corentin : Ce qui m’a marqué, c’est le cadre de travail. Je ne m’attendais pas à être dans un environnement aussi bienveillant et ouvert, où il y a autant d’espace pour la discussion entre collègues. On peut vraiment améliorer nos pratiques en nous confrontant les uns aux autres. C’est quelque chose qui m’a beaucoup plu.

Blandine : Et toi, Noémie, qu’est-ce qui t’a marqué en arrivant chez ÉbulliScience ?

Noémie : Pour moi, c’est vrai que mon expérience professionnelle précédente n’était pas trop liée à la science, je travaillais surtout dans des entreprises. Donc, comme Corentin l’a mentionné, j’ai également ressenti cette bienveillance. En plus, le fait que ce soit une petite structure facilite les échanges. J’ai trouvé qu’il y avait beaucoup de dialogue, et c’est pas gênant de s’inspirer des autres. Au contraire, c’est souvent ce qu’il y a de mieux à faire ! On prend le meilleur de chacun pour en faire un ensemble encore meilleur. C’est ça qui est intéressant : on essaie toujours de s’améliorer, de mieux comprendre le public en face de nous et aussi de mieux se comprendre entre collègues. On ne cesse jamais d’évoluer.

Blandine : L’année dernière, nous avons fêté les 25 ans de l’association. Qu’est-ce qui vous a marqué lors de cet événement ?

Corentin : Pour cet anniversaire, nous avons organisé trois événements : un à Lyon, un à Villeurbanne et un à Vaulx-en-Velin. Ce qui m’a marqué, c’est de retrouver un peu mes racines dans l’événementiel que j’avais pratiqué durant mon école d’ingénieur, au sein de l’associatif. J’ai beaucoup aimé l’organisation de ces soirées, y compris l’aspect logistique, comme porter des tables et des chaises.

Blandine : Et sinon, qu’est-ce que ça évoque pour vous, 25 ans d’ÉbulliScience, surtout en tant que nouveaux membres de l’équipe ?

Noémie : Pour moi, cela a surtout été l’occasion de mieux comprendre d’où vient ÉbulliScience. J’ai réalisé à quel point cette association a eu des conséquences sur la médiation scientifique. Étant donné que j’ai environ le même âge qu’ÉbulliScience, cela peut sembler peu, mais en fait, 25 ans, c’est une belle longévité ! Cela m’a aussi permis de découvrir la diversité des publics et des attentes que nous avons, surtout pendant la Fête de la Science. C’était génial de voir des parents avec leurs enfants, des adultes, tout le monde était là pour célébrer la science. Cela a enrichi mon expérience, car j’ai pu voir comment des expériences peuvent être perçues différemment selon le contexte. Cela m’a donné un nouvel éclairage sur notre travail.

Corentin : Ce qui m’a marqué, c’est l’anecdote que tu as racontée sur le fondateur de l’association, Henri Latreille, qui faisait les mêmes expériences avec ses étudiants à l’INSA et avec les enfants qui venaient à Vaulx-en-Velin. J’ai trouvé ça fascinant. Cela montre comment on peut changer le regard sur les sciences et les expériences, et que tout le monde peut trouver du sens et de l’intérêt dans ces découvertes.

Blandine : Vu qu’Henri Latreille faisait les mêmes expériences pour tout le monde, quelle est votre expérience préférée ? Noémie, commence par nous parler de la tienne.

Noémie : J’en ai plusieurs, mais une en particulier me tient à cœur : l’extraction de l’ADN de banane dans notre thématique de police scientifique. Les enfants adorent cette expérience ! L’idée est d’extraire l’ADN d’une banane. Je ne me souviens plus de toutes les étapes, mais on commence par mélanger différents ingrédients pour finalement obtenir une pelote d’ADN dans un tube à essai. Bien sûr, on ne voit pas l’ADN à l’œil nu, mais le fait de voir un regroupement de ce qui représente l’ADN est impressionnant. Souvent, les enfants disent connaître l’ADN, mais ne savent pas vraiment à quoi cela ressemble. Les voir émerveillés par cette découverte est assez spectaculaire.

L’autre expérience que j’apprécie beaucoup, c’est celle sur les groupes sanguins. Le sang, c’est un sujet que tout le monde connaît, mais peu savent vraiment ce que c’est. Dans cette activité, on utilise du faux sang pour expliquer les groupes sanguins. On propose une modélisation 3D du sang, ce qui permet d’aborder des notions comme la compatibilité pour les dons de sang ou même, dans le cadre d’une enquête policière, comment déterminer si c’est le sang d’un suspect. Cela pousse les enfants à réfléchir à des sujets qu’ils n’avaient pas encore explorés auparavant.

Blandine : Corentin, quelle est ton expérience préférée ?

Corentin : Mon expérience préférée, c’est celle qu’on appelle le colissimo. C’est une lampe équipée de miroirs et d’ouvertures spéciales qui permettent d’éclairer dans trois directions à la fois. On peut y insérer des filtres colorés, des fentes et divers petits objets. L’objectif est de jouer avec la lumière et d’observer ce qui se passe lorsqu’on mélange des lumières de différentes couleurs. Par exemple, on peut mettre un prisme devant la lumière, comme l’avait fait Newton, pour dissocier la lumière blanche en un arc-en-ciel.

Ce que j’adore avec cette expérience, c’est qu’il y a une multitude de découvertes possibles. On peut aborder des concepts extrêmement complexes de manière accessible, même avec des publics assez jeunes. C’est fascinant de voir leur émerveillement et leur curiosité face à ces phénomènes lumineux.

Blandine : Merci à vous deux d’avoir participé à ce podcast. Merci également pour le travail que vous accomplissez au quotidien. En tant que directrice de l’association, je tiens à remercier tous les médiateurs et toutes les médiatrices qui s’engagent au sein d’ÉbulliScience, et que vous représentez aujourd’hui. Merci beaucoup !

Noémie : Merci

Corentin : Merci à toi

Merci encore à Noémie Faisnel et Corentin Mammi pour cet échange passionnant.
Nous espérons que celui-ci vous a plu. N’hésitez pas à partager l’épisode autour de vous. Et on se retrouve bientôt pour un nouvel épisode de Parlons science, le podcast de la médiation scientifique.